Evernight – Ep. 09
Présents : Catulla (X.O.), Hamilton Mc Cormak (Arnok), Locke (Bankace), Odel Razakar (Casa), Aelyn Sombre-Feuille (Chris)
Personnages impliqués : Reg, lord Herrek, des pleurs et des calins, d’autre groupe d’aventuriers, des milliers de réfugiers (gros budget).
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- Premier épisode
- Episode 08 • Episode 10
Sarah menait les fuyards dans le dédale des égouts de Port-Royal. Le groupe hétéroclite d’esclaves fatigués dont nous faisions partie tentait tant bien que mal de la suivre tout en portant les blessés. L’endroit était beaucoup moins entretenu que lorsque nous y étions passés la fois où nous cherchions Bareena. Avec l’attaque qu’avait subie la ville, il y avait probablement d’autres priorités que celle de nettoyer les conduits permettant de rejeter les eaux usées des riches manoirs que plus personne n’habitait de toute manière. Après vingt minutes de course qui mirent à rude épreuve nos organismes déjà faibles, nous arrivâmes à un nouveau conduits nous menant vers le bas. Un nouveau réseau de tunnels, parsemé de stèles, couvrait notre fuite. Sur le passage, une grappe de tonnelet dont les mèches qui en sortaient ne laissaient que peu de doute quant à leur utilité, avait été fixée ici avant notre passage. Cette opération avait bien été préparée. Des hommes et des femmes étaient libres quelque part au-delà de ces boyaux étroits. Alors même que nous avions dépassé quelques bifurcations, le souffle de l’explosions fit voler la poussière qui tapissait le sol. Nous n’avions plus aucun moyen de remonter par là où nous étions arrivés. D’un autre côté, nos geôliers n’auraient pas non plus la possibilité de suivre nos traces. Encore une demi-heure de course, et nous plongeâmes encore un peu plus dans les profondeurs de la falaise sur laquelle la ville de Port-Royal avait été construite puis détruite. Les murs maçonnés laissèrent leur place à des parois de roche. Nous n’étions plus dans un complexe créé de la main de l’homme, mais dans le réseau formé pendant des éons par les infiltrations venant de la surface. C’est là, nous l’avait raconté Coeur Vaillant, que les trolls des mers avaient capitulé face au courage de Katrina. Sarah, considérant surement qu’enfin, nous étions hors de portée de nos ennemis, ralentit le pas.
Nous arrivâmes bientôt au bord d’une petite rivière. En face, des centaines de tentes et de cabanons étaient regroupées formant un ersatz de cité. Sarah sortit un pendentif de sous sa tunique et le leva. Il se mit à luire d’une intense lumière blanche. Sur l’autre rive, deux hommes en armure lui firent signe. Ils mirent à l’eau trois embarcations de fortune et les poussèrent jusqu’à nous. La vingtaine d’hommes et de femmes exténués ne purent tous monter à bord des amas de bois flottant à peine. Alors qu’Odel, Locke et Catulla restèrent au sec, Hamilton et moi-même laissâmes nos places à ceux qui n’avaient plus la force de traverser à la nage. Arrivés tous sains et saufs sur l’autre côté, nous ne prîmes pas le temps de nous sécher. À peine le pied posé sur le sol, Sarah nous demandait de la suivre jusqu’à une grande tente montée au centre du camp. Autour de nous, la foule des deux mille âmes réfugiées sous la ville nous regardait. Si la plupart des visages nous souriaient, certains nous fusillaient du regard comme pour nous accuser de quelque chose d’innomable.
— Pourquoi y’en a qui nous regarde comme ça ? demandais-je à Sarah.
— La nourriture est rationnée. L’arrivée de nouveaux réfugiés signifie plus de bouches à nourrir.
Nous fûmes chaleureusement accueillis dans la tente de Solace. On fit s’allonger les blessés, on nous donna des tuniques propres et l’on nous offrit à tous une écuelle de ragout fait à partir d’un petit poisson et de quelques plantes étranges. C’était succulent, même si après un régime à base de rat crevé, tout devait l’être. Les deux prêtres, Rada et Giniane étaient assistés de trois chevaliers rouges. Ils s’occupèrent des blessés dès leur entrée dans la tente. Je m’affairais à remettre de l’ordre dans mes affaires quand Cat se mit à crier.
— Tam ! Tam ! C’est Tam ! Elle est vivante !
Je me retournais vivement. C’était bien elle. Tam était là. Je ne pus m’empêcher de courir vers elle. Je la pris dans mes bras. Je la portais pour la serrer contre moi. Tam était vivante. Et elle riait. Je riais aussi. J’en pleurais même. Quand je la laissais enfin repartir se consacrer à ses tâches, je me rendis compte que j’avais dû la garder ainsi un peu trop longtemps. Mon écuelle était froide. Mais qu’importe, tout allait bien maintenant. Enfin, disons que tout allait un peu moins mal. Les Maîtres étaient toujours là-haut, dans la ville.
— Vous avez vaillamment combattu tout à l’heure. Vous n’êtes pas des gens ordinaires. Nous fît remarquer Sarah.
— Non, nous ne sommes pas des gens ordinaires, nous sommes des héros, répondis-je en bombant le torse.
— Enfin… des héros… disons que nous sommes des aventuriers qui avons fait ce que nous pouvions pour vous aider à nous libérer, relativisa Cat.
— Voici mes compagnons. Je vous présente Hamilton, chevalier rouge qu’on appelle aussi courte lame, Catulla qui joue de sa lance aussi bien que de son bouclier, Odel, mage de Mirzidor, Locke, un vieil homme qui se bat comme s’il avait vingt ans et Reg, un bandit qui a eu l’audace de nous tendre une embuscade.
— Et vous ? Vous êtes ?
— Je ne me suis pas présentée ? Euh… Aelyn Sombre-Feuille… mais vous pouvez m’appeler Aelyn. Enchantée. Je suis une archère somme toute assez douée…
— Et quel est le nom de votre compagnie ?
— Bah, au début on s’appelait les Quatre, mais vu qu’on est cinq maintenant, six même, en comptant Reg…
— Nous ne pouvons pas compter Reg, coupa Hamilton, c’est un malfrat. Il a fui un combat qui plus est.
— Il a quand même eu le courage de nous attaquer, c’est pas rien, répondit Odel en souriant.
— C’est pas la question de toute manière. On s’appelait les Quatre et on est plus quatre. Il faut qu’on change de nom.
— Vous aurez tout le loisir de vous en choisir un. Mais il faudra que vous le fassiez pour que les gens ici sachent que de nouveaux héros sont parmi eux. Pour l’instant, le plus important, c’est d’aller voir lord Herrek.
— Le Lord Herrek ? Le Loup ? Le champion du roi ?
— Celui-là même Odel, répondit Sarah en se tournant vers la sortie. Suivez-moi.
Un des coins du campement était agencé un peu différemment du reste. Une palissade irrégulière protégeait plusieurs grandes tentes. Deux gardes en maille et en livrées jaune et noir en gardaient l’entrée. Je me demandais à quoi pouvait bien servir une clôture au milieu d’un camp de réfugiés, mais je n’eus pas le temps de réfléchir à la question. Sarah nous fit entrer dans la plus grande des tentes. À l’intérieur, un homme assez imposant était appuyé sur une grande table. Il étudiait une série de plans et de cartes diverses pendant que, derrière lui, quelques hommes et femmes discutaient ensemble de stratégie. L’homme à la barbe grisonnante leva la tête et nous regarda.
— Lord Herrek, je vous présente un nouveau groupe d’aventuriers. Nous venons de les libérer avec une vingtaine d’autres esclaves. En plus de savoir se battre, ils ont aussi rencontré Arwik, dit Sarah en guise de préambule.
— Bienvenue à « Port-Royal », messieurs dames. Heureux de vous voir parmi nous. J’espère que vous accepterez de faire partie de la résistance. Ainsi, vous avez rencontré Arwik. Comment va-t-il ?
— Pas bien. Il est mort, monsieur. répondis-je en baissant la tête. On a fait tout ce qu’on pouvait pour le sauver, mais on a pas pu.
— C’est bien fâcheux. Vous a-t-il dit quelque chose ? Confié un objet ?
— Dans son dernier souffle, il a juste eu le temps de murmurer « Je suis Arwik, cherchez Valador ».
— Ah… cela ne nous aide pas beaucoup. Valador est un nom assez commun. De qui a-t-il voulu parler ?
— Peut-être que c’est un lieu ? dis-je.
— Ou peut-être a-t-il dit Val à Dor ? ajouta Cat.
— Je ne sais pas, nous réfléchirons à tout cela plus tard. répondit Herrek en se pinçant les lèvres. Arwik est celui qui, à ce qu’on dit, a mis notre roi et la princesse en lieu sûr. Lui seul sait… enfin, savait où ils se trouvent. Cela ne va pas rendre faciliter notre tâche.
— Si on peut aider, ce sera avec plaisir. Comment ça se passe pour obtenir des missions ?
— Demandez un entretien avec Aden dès que vous êtes rétablis. Sachez que nous avons ici, le même fonctionnement qu’avant l’attaque. Nous rémunérons les héros. Vous n’aurez pas grand-chose à acheter, il y a peu de marchandise, mais c’était important, à nos yeux, de garder ce type de relation avec vous autres.
— J’avais une dernière question si vous me permettez lord Herrek.
— Oui ?
— Est-ce que Jacob Galstaf est ici ?
— Pas à ma connaissance. Que lui voulez-vous ?
— Il nous a demandé de transmettre une missive à son fils. Malheureusement, on l’a retrouvé mort dans d’anciennes ruines sa-karan. On leur a offert une sépulture décente et j’ai l’anneau de Trabian. Je voudrais le remettre à son père.
— Les Cavaliers Écarlates ne s’en sont donc pas sortis ?
— Non.
Herrek sera les mâchoires.
— Jacob Galstaf n’est pas ici. Mais son frère, Trévor est un des chevalier rouge qui travaillent aux côtés de Sarah. Vous le trouverez dans la tente de Solace.
— Merci lord Herrek.
— Vous pouvez disposer.
Sans un mot de plus, nous quittâmes le fortin. Sarah prit un parchemin, griffonna quelques instructions à destination du magasin du camp et insista pour que nous nous trouvions un nom. Nous pûmes retirer une tente de plutôt bonne facture que nous installâmes, à mon fort défendant, en bordure d’une zone sans prestige. J’aurais largement préféré que nous soyons plus proches de la garnison ou de la tente de Solace. Mais les autres ont préféré rester discrets. Je fus aussi un peu déçue par le choix du nom. Alors que j’avais proposé les « Pourfendeurs d’Orcs », les autres préférèrent les « Déchaînés », soi-disant en rapport avec notre ancien état d’esclave. Si nous avions pu effacer ce passage dégradant de notre histoire, ça aurait été une bonne chose. Nous verrons bien si cela ne nous pose pas trop de problèmes à l’avenir. Enfin, toujours est-il que nous étions devenus les « Déchaînés ».
Locke passa toute une journée dans la tente de Solace où on lui prodigua des soins plutôt efficaces. J’en profitais pour prendre Trévor Galstaf à part.
— Trevor Galstaf ? demandais-je en m’approchant d’un grand homme à la barbe blanche, d’une soixantaine d’années.
— Moi-même.
— Bonjour, je me présente, je suis Aelyn Sombre-Feuille et voici mes compagnons. Nous sommes les Déchainés. Parmi les mauvaises nouvelles qui doivent arriver chaque jour ici, j’en ai une qui vous concerne. Désolé.
— Dites, répondit le vieil homme en grimaçant.
— On a été en mission pour votre frère, Jacob. On devait transmettre une importante missive à son fils, Trabian. Malheureusement, on l’a retrouvé mort, dans des ruines sa-karan. On a offert une sépulture à son corps et à celui de ses compagnons qui reposent avec leurs armes. J’ai récupéré sa chevalière pour la remettre à sa famille. Il semblerait que vous soyez son plus proche parent ici.
— Oh… merci. Dis Trévor, la voix hésitante, en nous regardant tour à tour. Je ne sais pas quoi vous dire. C’est tout à votre honneur. Nous parlerons de lui à la veillée de ce soir. Vous viendrez ?
— Oui, je serais là avec mes compagnons.
— Je trouverais comment vous remercier.
— Vous savez, ça nous a semblé tout à fait… tenta de répondre Cat.
— C’est tout à fait normal. On est des héros au service de Valusia.
Nous profitâmes de la convalescence de Locke pour explorer le camp. Les tentes et les cabanes faites de bric et de broc étaient pour la plupart regroupées dans la partie nord et sud-ouest de la cavité. C’est à la limite de cette dernière zone que nous avons installé nos quartiers. Au centre, non loin de la tente de Solace, une petite place avait été aménagée. Quelques tentes avaient été installées. Des marchands y vendaient quelques pièces d’équipement à des prix exorbitants, presque le double de ce qu’on avait l’habitude de pratiquer avant l’attaque. Aussi étonnant que cela pût paraitre au vu des circonstances, les échanges se faisaient toujours en pièces d’or. C’est aussi ici que les habitants du camp se réunissaient pour socialiser autour d’un verre d’eau, seule boisson disponible. Le fortin de lord Herrek se trouvait dans le coin sud-est de la caverne, un peu isolé du reste de la population et protégé par une barricade de fortune. L’entrée du camp se faisait par l’ouest où un poste de garde avait été installé aux abords d’une rivière à l’eau légèrement salée, coulant du nord vers le sud. Côté aval, des zones d’intimité avaient été aménagées afin que les réfugiés puissent se laver et plus loin encore, faire leurs besoins. Deux autres groupes de héros avaient pris leurs quartiers dans le camp. Un panneau de bois affublé d’un dessin d’enfant représentant une espèce de bestiolle à huit pattes barré d’une croix rouge annonçait la présence des Massacreurs d’araignées. Au nord, le poing serré enfermé dans son cercle brodé sur un oriflamme, accrochée sur la principale tente ne laissait aucun doute sur l’identité de ceux qui occupaient cette zone. Les Briseurs de Golems étaient eux aussi de la partie. Cela me rappela que nous avions en notre possession, l’anneau de Ralugon, le nain qui nous avait salués alors que nous nous rendions à Aragron. Il avait trouvé la mort au bord du pont traversant la Draguiris. Comme pour Trabian, il fallait que j’annonce la mauvaise nouvelle à ses compagnons. J’entrais dans leur camp, la tête basse.
Au milieu des tentes, une femme aux larges épaules, couverte de transpiration, faisait de grands mouvements avec son épée à deux mains. Elle semblait combattre au ralenti et en silence un ennemi invisible. Je la regardais quelques instants, hypnotisée par ces gestes élégants. Puis je secouais la tête, comme pour me sortir d’un rêve et allais à sa rencontre.
— Bonjour, vous êtes bien les Briseurs de Golems.
— C’est nous. Je suis Romwind. Et vous êtes ? répondit-elle en me tendant la main.
— Aelyn. Aelyn Sombre-Feuille des Déchainés, dis-je en lui tendant la main à mon tour.
Finalement, je trouvais que ce nom nous correspondait bien. Il me plaisait. Mon sourire s’effaça lorsque je me souvins du pourquoi nous étions ici.
— Nous avons une mauvaise nouvelle à vous annoncer. C’est à propos de Ralugon. Continuais-je.
— Dara ! Y’a des gens qui veulent te parler ! C’est à propos de Ralugon.
La naine qui travaillait à la forge se retourna. Elle prit un chiffon et s’essuya les mains puis s’approcha de nous.
— Bonjour, moi c’est Dara. Je suis la compagne de Ralugon.
Je m’effondrais intérieurement. Comment allais-je lui annoncer la mort de son mari ? Je repris mon souffle, je me concentrais. J’ouvris la bouche et repris à nouveau ma respiration.
— Et bien, accouchez ! Qu’est-ce que vous avez à me dire ?
— Ce n’est pas une annonce facile madame Dara. Dis-je en tendant l’anneau de Ralugon.
Dara fixa la paume de ma main pendant quelques secondes puis me regarda. Dans ses yeux, je vis des larmes apparaitre. Elle tentait bien de les retenir, mais sa souffrance était trop forte, presque palpable.
— Je suis désolé, puis-je enfin dire. On l’a trouvé au bord de la Draguiris. Le pont était effondré. Il est mort le marteau à la main. On lui a confectionné un tumulus dans lequel il repose maintenant avec son arme.
— Merci de tout cœur, cet anneau est un peu l’âme de ce groupe. Dit-elle en essuyant les larmes qui coulaient maintenant sur ses joues ?
Dara se retourna simplement, serrant l’anneau de son défunt mari dans son poing. Je la regardais s’éloigner sans bouger, sans rien dire. À mon tour, je ne pus m’empêcher de pleurer. D’un geste brusque, je me retournais, je regardais mes camarades et je fis demi-tour.
— C’est bon, on va pas rester ici comme des crétins. On a des trucs à faire. Odel, tu voulais pas causer avec ton collègue des Massacreurs d’araignées ? Faut aller voir Aden aussi. Dis-je en bousculant mes camarades pour tenter de cacher mes émotions.
Le camp des Massacreurs d’araignées était beaucoup moins impressionnant que celui des Briseurs de golems. Un simple panneau de bois et un insigne enfantin laissaient à penser que ce groupe n’était pas des plus professionnels. Dans un coin, un demi-orc nettoyait une arme à poudre.
— Salut, qu’est-ce que je peux faire pour vous ? Demanda-t-il en leva à peine la tête.
— Ouais. Salut. On cherche les Massacreurs d’araignée. Répondis-je sans le regarder.
— Vous les avez trouvés. Qu’est-ce que je peux faire pour vous ?
Je tournais la tête vers lui. Il faisait donc partie de ce groupe d’aventuriers. Ou de bandits, devrais-je plutôt dire. Cette chose qui nous parlait en disait encore plus long que le panneau à l’entrée quant à la qualité de leurs services.
— Va chercher Parapuce.
Le demi-orc se contenta de souffler et appela le magicien de Mirzidor. Un homme à la coiffure hirsute, mal rasé, habillé comme un sac se présenta. Je levais un sourcil et regardais Odel.
— C’est ça ton soi-disant collègue de Mirzidor ?
— On dirait bien, répondit le magicien.
— Salut, à qui j’ai l’honneur ? déclara Parapuce.
— Odel, magicien de Mirzidor, tout comme vous il paraît.
— Ah… et vous voulez quoi… collègue ?
— Et bien, je venais simplement me présenter. Il parait que ça se fait.
— C’est vous le groupe qui est arrivé hier ? Paraîtrait que vous avez combattu un Maître. C’est son bâton que tu as là ?
— Oui, c’est bien le bâton du Maître que nous avons tué.
— Respect, respect. Et vous êtes sûr qu’il est mort ? Parce que, à ce qu’on dit, ils auraient un lien mental avec leur machin. Faudrait pas qu’ils nous retrouvent. Tu l’as essayé ?
— Non, pas encore. Nous sommes venus directement ici après avoir tué nos geôliers.
— Et il ne va pas l’essayer. En tout cas, pas tant qu’on est à côté. Je ai pas envie qu’Odel blesse la moitié des gens qui sont dans ce camp. On est un groupe de héros professionnel, pas des amateurs.
— Ah… OK… vous êtes des pros. C’est quoi votre nom déjà ?
— Les Déchainés.
— Jamais entendu parler. Mais c’est un chouette nom pour des anciens esclaves. Odel, tu devrais quand même être prudent. L’elfe à raison, leur magie est différente de celle qu’on enseigne à Mirzidor. Mais tu dois déjà le savoir.
— Bien sûr que je le sais. Vous faites quoi depuis que vous êtes arrivé ici ?
— Et bien, on a surtout ramené des algues vertes pour nourrir tout le monde. Lord Herrek y envoie des gens expérimentés à cause des trolls.
— C’est pas des araignées que vous êtes censé tuer ? demandais-je.
— Non, pas depuis qu’on est ici. Odel ? Elle a quoi la p’tite là ?
— Ne vous occupez pas d’elle, elle est un peu à cran.
— Mais, je ne suis pas à cr… Bon, content de vous avoir rencontré. Si vous avez besoin de quelqu’un qui sait se battre, on a mis notre tente là-bas. Dis-je en boudant.
Une veillée en l’honneur des morts fut organisée le soir même. Une foule compacte s’était rassemblée autour des tables des marchands au centre de la caverne. Près de deux cents âmes participèrent à l’hommage. Nous fûmes sollicités pour raconter comment nous avions découvert les corps de ceux dont nous avions annoncé la mort. Je commençais à parler quand Hamilton me coupa. Je fus un peu surprise sur le moment, mais je finis par me dire qu’il valait mieux le laisser faire. La longue absence de Solace lui pesait très certainement. Il fallait lui laisser un peu le devant de la scène. Il parla de Ralugon, et de Trabian. J’ajoutais également dans son histoire Saler Falon, l’ancien chevalier rouge qui gardait l’entrée d’Aragron, Simon Rothleg, le secrétaire des Galstaf et bien sûr les deux compagnons de Trabian que nous avions aussi découvert dans les ruines sa-karan. La soirée fut longue et l’absence d’alcool n’aida pas à nous remonter le moral.
La cérémonie terminée, nous rentrâmes dans nos quartiers. Trévor Galstaf nous y rejoignit. Il sortit une magnifique épée de son fourreau, et nous la tendit. Elle était noir et rouge et un léger filet doré et luisant séparait la lame en deux. Trévor se concentra et son arme prit feu. Il nous regarda, puis la fixa à nouveau pour qu’elle s’éteigne.
— Tenez, elle vous sera surement plus utile à vous qu’à moi.
— Oh. C’est gentil. Hamilton, je pense qu’on pourra plus t’appeler courte lame maintenant, dis-je avec malice.
— Seigneur Galstaf, c’est un honneur. Je chérirais cette lame autant qu’on peut chérir un objet de cette valeur. Avec elle à mes côtés, je ne pourrais qu’encore mieux servir Solace.
— Vous la méritez. Encore merci d’avoir offert un départ digne à Trabian et de m’avoir ramené son anneau. Cette épée est vraiment la moindre des récompenses pour ce que vous avez fait. Au revoir, mes amis, je suis heureux que vous ayez pris part à la résistance. Nous avons besoin de héros comme vous.
Trévor Galstaf sortit en reculant. Un jeune homme d’à peine une dizaine d’années entra dans notre tente en bousculant le chevalier.
— Un paquet pour vous ! Vous êtes bien les Déchainés, c’est ça ? C’est vous Aelyn Sombre-Feuille ? demanda-t-il en me tendant une boite enveloppée de toile.
— Euh… oui, c’est moi… enfin, c’est nous. Enfin bref. Répondis-je en prenant le colis.
— Bah, vous l’ouvrez pas ? demanda le garçon.
— Si, si, on va l’ouvrir. On a rien pour toi, tu sais. On vient d’arriver. Reviens plus tard quand on aura un peu travaillé. Pour l’instant, on a les poches vides. Dis-je pensant que le garçon attendait un pourboire.
— Qu’est-ce qu’il y a dedans ? Ils vous ont envoyé quoi les Briseurs de golems ?
Le jeune homme était visiblement plus intéressé par le contenu de la boite que part une quelconque rémunération. Je me dis que j’aurais mieux fait de me taire et ne rien lui proposer. Je défis les nœuds de la ficelle qui tenait le tissu et je découvris trois pierres gravées de runes. Une lettre les accompagnait. « Merci d’avoir ramené l’anneau de Ralugon. Vous méritez ses trois pierres. Les instructions pour s’en servir sont au dos ». Comme quoi, ma mère avait eu raison de m’inculquer un minimum de bonnes manières.
Au bout de cinq jours, Locke put enlever enfin ses bandages. Locke semblait un peu plus solide qu’avant ses blessures. Il n’arrêtait pas de nous répéter « Ce qui ne nous tue pas nous rend plus forts ». Un mal pour un bien, nous avions eu le temps de nous entrainer. Odel se plongea dans les études pour apprendre à accumuler plus efficacement les énergies magiques. Hamilton travailla longuement, à la manière de Romwind, avec sa nouvelle épée, la portant à bout de bras. Cat aiguisa ses réflexes au point d’arriver à attaquer tous ceux qui s’approchaient trop d’elle. Quant à moi, je m’entrainais plusieurs heures par jour à tirer deux flèches en même temps.
Comme promit à lord Herrek, une fois tout le monde remis de ses blessures, nous partîmes nous entretenir avec Aden. Les gardes eurent une courte hésitation, mais finirent par nous laisser entrer. Aden était bibliothécaire à Mirzidor. Odel l’avait déjà croisé quelques fois durant sa formation. Il nous demanda de lui raconter tout ce que nous vécut depuis le drame. Je commençais par le début : par notre embauche par Jacob Galstaf. Jamais Aden ne m’interrompa. Il prenait des notes, beaucoup de notes, hochait la tête de temps en temps, tout en me laissant parler à mon rythme. Le récit dura presque une demi-heure. Une fois le silence revenu. Il relut son parchemin, nous regarda tour à tour et prit la parole.
— Ce que vous me racontez là est assez inquiétant. Cela prouve que les spiners, créatures assez rares, étaient là avant l’arrivée du pic et du reste des troupes. Peut-être en éclaireurs ou pire, ils sont là depuis toujours.
Dramatis Personae
Bareena est une aventurière dératisatrice. Les héros l’ont rencontrée dans les égouts de Port-Royal alors qu’elle était entrain de se débarrasser de nuées de rats. Ils l’ont aidée dans sa tâche. Elle connait Albian Galstaf et leur a indiqué où il était parti.
Coeur Vaillant est un célèbre troubadour. Les héros l’ont rencontré , sans lui parler, dans une auberge à Aragron où il a raconté l’histoire des Septs et du roi troll.
Dara est la compagne de Ralugon. Les aventuriers l’ont rencontré la première fois au camps de Port-Royal alors qu’ils lui rapportaient l’anneau du nain autre fois chef du groupe des Briseurs de Golems.
⚰️ Émile Keswraith est un prospecteur nain. Il a indiqué aux héros où se trouvait les ruines sa-karan qu’Albian Galstaf cherchait à explorer. Il a été trouvé mort à Aragron, gisant au coté du corps de Saler Falon.
Giniane est un prêtre de Solace d’une trentaine d’années. Il officie dans le camp de réfugiés situé sous la ville de Port-Royal.
Gralène est un ancien officier de la garde. Le groupe l’a rencontré alors qu’ils démontaient le manoir des Galstaf. L’homme aux cheveux grisonnant leur a donné de quoi manger et leurs a expliqué le sort réservé aux faibles. Les vieux et les enfants ont tout simplement servi de nourriture aux envahisseurs. Il a été libéré de ses chaînes en même temps que les aventuriers.
Aussi appellé « Le Loup », lord Herrek est le champion du roi. Il a lancé la résistance en créant un camps de réfugié dans une immense grotte situé sous la ville de Port-Royal. Les aventuriers se sont mis à son service à leur arrivée dans le camp. Des rumeurs cours à son sujet. Il aurait été capturé par les Maîtres et aurait tenté de tuer le roi. On raconte même qu’il serrait toujours controlé par les ennemis.
Jacob Galstaf est le premier commanditaire des héros. C’est un riche marchand d’épices, très proche de la noblesse de Port-Royal. Il a fait passer une annonce discrète à laquelle ils ont répondu.
Jonasz Skulf tient le bar de la célèbre taverne de Port Royal l’Ombre du Roi.
Parapuce est magicien de Mirzidor tout comme Odel. C’est un membre du groupe d’aventurier des « Massacreurs d’araignées ».
⚰️ Simon Rothleg est le secrétaire particulier des Galstaf. C’est lui qui a expliqué au héros en quoi consistait leur première mission. Il semble désinvolte, souriant et avenant. Son corps a été retrouvé dans les gravas du manoir de ses anciens employeurs.
Rada est une prêtresse de Solace d’une vingtaine d’années. Elle officie dans le camp de réfugiés situé sous la ville de Port-Royal.
⚰️ Ralugon est un nain à la réputation jovial. Il est le chef des Briseurs de golems. Les héros l’ont croisé au début de leurs aventures alors qu’ils se rendaient à Aragron. Ils ont ensuite retrouvé son corps, à moitié dévoré au pied du pont enjambant la rivière non loin du village de bucheron. Aelyn a récupéré son anneau pour attester l’avoir trouvé. Un tumulus a été érigé en son honneur.
Reg est un brigand qui, avec ses acolyte, a organisé une embuscade sur la route menant à Aragron. Malheureusement pour lui, il est tombé sur les aventuriers et a essuyer une sévère et brutale défaite. Tous ses compagnons ont été tués. Quant à lui, il a été forcé d’intégrer le groupe pour aller, à son fort défendant, jusqu’à Port-Royal.
Romwind est une guerrière membre des Briseurs de golems. Les aventuriers l’ont rencontré la première fois au camps de Port-Royal alors qu’ils rapportaient l’anneau de Ralugon.
⚰️ Les héros ont rencontré Saler Falon alors qu’il gardait la palissade à Aragron. C’est un ancien chevalier rouge. Il a perdu son bras au court d’une aventure et a été soigné dans le village où il habite aujourd’hui. Son corps a été découvert dans la salle principale de l’auberge d’Aragon.
Sarah est une prêtresse de Solace. Elle dirige le culte dans le camps de réfugiés situé sous la ville de Port-Royal. C’est elle qui a permis à la résistance de libérer les aventuriers du joug des Maîtres.
Tam est une petite fille retrouvée près d’une maisonnette à moitié détruite par les flammes, située à une journée de marche d’Aragron. Elle était prostrée derrière un muret, complètement paniqué. Les héros l’ont recueillie et persuadée de les accompagner jusqu’au village de bucheron. Alors que tout le monde la croyais morte, elle surgit de nul part dans le camps de réfugiés sous Port-Royal.
⚰️ Trabian Galstaf est le fils de Jacob Galstaf. Il était membre des Cavaliers Écarlates. Les héros l’ont retrouvé mort dans d’anciennes ruines Sa-Karan. Il a vraisemblablement perdu la vie en combattant des espèces de tripodes arachnéens. Aelyn a récupéré sa chevalière portant les emblèmes de sa famille.
Trévor Galstaf est le frère de Jacob. C’est un chevalier rouge travaillant au côté de Sarah dans le camp de réfugié de Port-Royal. Les aventuriers lui ont remis la chevalière de son neveu Trabian. Il a offert une épée longue enflammée à Hamilton.